A peine le massacre de Vassy (1562) est-il perpétré que, quatre ans plus tard, en 1566, on parle de temple en « Arvert ».
Le 29 avril 1566, Monsieur Jacques Vigier de Tresleboys vend un terrain pour y construire un temple. Ce terrain se situe, d’après le testament de la veuve Chenu en date du 30.05.1568, sur le chemin qui prend à la principale rue d'Arvert et va aux Mathes.
C'est sous l’impulsion de Charles Léopard, le célèbre ministre, que cette vente se fait, le contrat se passant chez Me Sauvaget, notaire royal. Trois cents livres sont empruntées à Pierre Devaux pour cette construction.
Le temple est-il trop petit ou mal construit ? En 1609 on en construit un autre, sans doute au même emplacement. Pour ce deuxième édifice tout ne se passe pas très bien et sa construction donne lieu à un procès.
Devant Elizée Béchet, notaire royal, Cosme Béchet notaire, procureur fiscal de Beauregard et Jacques Chenu, notaire, les notables sont convoqués et il leur est signalé qu'ils doivent encore à Mathurin de Lanouhe la somme de 60 livres « pour les ferrures des fenêtres et des portes ».
De Lanouhe ayant « actionné » Béchet Chenu, le juge d'Arvert condamne nos notables à payer et ils « appellent » au dit jugement. Il est aussi dû « 159 livres 8 sols aux dits Chenu et Béchet », 11 livres Tournois à Jehan Bonnyn. Pour toutes ces causes « tous les deniers égallés et colligés ayant été employé aux frais du dit bastiment » les habitants sont « sommés de payer les dites sommes et faire cesser la dite poursuite. Les dictes Béchet et Chenu protextent contre eux de tous les despans ».
Menacé de destruction, le temple est maintenu par ordonnance du 28 février 1664. Entre temps en 1655, Daniel Vigier, écuyer, petit-fils de Jacques Vigier donne quittance aux habitants d'Arvert du terrain vendu par son grand père.
Le 7 septembre de la même année a lieu le baptême de Tanné Chaillau qui laissera plus tard un intéressant journal décrivant la vie des réformés en ces temps troublés.
Dans le village de Dirée proche d'Arvert, ancienne paroisse catholique, la chapelle transformée en temple, s’écroule vers 1664. Ainsi fini Saint Symphorien de Dirée.
Le Roi Louis XIV est à son apogée et les temps deviennent de plus en plus durs pour les protestants. La révocation de l’Édit de Nantes (1685) approche. Le 2 mars 1682 arrive en Arvert l’arrêt du conseil d'État ordonnant la démolition du temple d'Arvert. Il est jeté bas, détruit jusqu’à ses fondations et ses matériaux vont servir à agrandir l’église catholique. Le cimetière et la place du temple sont pris en rente par le prêtre Delafarge, le roi les ayant donnés au couvent.
Les cultes doivent continuer semi-clandestinement car en 1683, le 23 mars, il est fait interdiction de culte « en Arvert ».
Louis XIV meurt en 1715 et son arrière petit-fils Louis XV n’est pas plus tendre avec les protestants. Il n’existe aucun temple en Saintonge.
Dans quel lieu les protestants d'Arvert célèbrent-ils leur culte pendant les années 1683 à 1740 ? Nous ne savons rien de ces années.
A l’automne 1755, en Saintonge, sous l’impulsion du pasteur Gibert, des granges sont transformées en Maison d’oraison. Dans notre secteur, l’Isle d’Etaules, les Grandes et Petites Roches vont à Paterre (Commune de Chaillevette), tandis que les Mathes, Arvert et Étaules vont à Avallon[1], petit hameau à 2 km d'Arvert. Là une femme courageuse, Martine Pasdejeu, a donné sa grange qui est transformée en maison d’oraison. Pour ce geste généreux, mais interdit, elle est condamnée, par contumace, à la détention perpétuelle à l’hospice de La Rochelle. Raison : avoir prêté sa maison aux protestants pour leurs assemblées religieuses. Mais la maison d’oraison ne sera pas détruite.
Cette situation va durer jusqu’au 23 mars 1834 pour qu'Arvert demande au Consistoire l’autorisation de solliciter le secours des communes des Mathes et d'Arvert pour édifier un temple au bourg à l’usage des fidèles d’Arvert. Le consistoire donne son accord.
Le 28 octobre 1836 la construction est commencée sur un terrain donné par la commune, mais le devis s'élève à 13.986,50 F et l’on doit faire une demande au gouvernement. Cette demande au roi Louis-Philippe tombe en pleine crise ministérielle au cours de la deuxième période de son règne, lorsqu'il veut régner et gouverner. C’est l'époque du ministère Molé - Guizot. Les protestants d'Arvert comptent sur « la magnificence de ce gouvernement en espérant que sa majorité voudra bien ne pas s’y refuser ».
Cette « magnificence » se monte à 4,20 F !
Une solution est trouvée: pendant les travaux nos protestants se réunissent pour prier Dieu dans le chai de M. Charles Doucet. Granges et chais ont toujours été prisés par un Saintongeais, protestant ou non.
Tout doucement, quatre ans après, un secours de 2.000 F est débloqué pour aider aux frais de construction et, le 6 août, le budget se présente comme suit, malgré le don du terrain par la commune :
Recettes : |
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Les Mathes |
200,00 F |
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L'État : |
2.000,00 F |
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Les fidèles : |
212,50 F |
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Total = |
2.412,50 F |
Dépenses : |
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Dû : |
4.204,00 F |
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Intérêts : |
210,20 F |
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Total = |
4.414,20 F |
D’où un déficit de : 4.414,20 – 2.412,50 = 2.001,70 F
Comment va s'éponger ce déficit ? Nous ne le savons pas, mais en 1841, les peintures du tambour et de la balustrade sont refaites.
Les places assises et payantes devenant insuffisantes, en 1848, il est décidé l’installation d'une tribune, ce qui permet de satisfaire toutes les réclamations, cette tribune étant principalement destinée aux chanteuses de la chorale.
Les années qui vont suivre seront une suite de travaux d'entretien du bâtiment jusqu'en 1882 où les fonds départementaux sont à nouveau sollicités pour le renouvellement de l’ameublement, plus l'achat de deux tableaux destinés à recevoir les Commandements et la Loi, plus douze candélabres.
L'an 1889 voit naître un projet de deux fenêtres au-dessus de la tribune. La paroisse est disposée à faire l'avance si la municipalité s’engage à en porter la somme au budget supplémentaire de l’année courante. Bien qu’elle n'ait pas contribué financièrement à sa construction, la commune d'Arvert devient propriétaire du temple à une date non encore connue, ni dans quelle condition et circonstance.
Différents travaux sont encore faits dans le temple : en 1885, reconstruction de l’escalier de la tribune, remplacement en 1897,de la porte vermoulue et des volets de la sacristie, en 1902, achat de rideaux et de tapis.
L'année 1903 est une grande année pour notre temple qui se voit livré aux ouvriers. On lui refait la charpente, la toiture, le plafond et les fenêtres. ! Quelle toilette ! Coût de l’opération : 3.700 F. Tous ces travaux sont terminés en octobre 1903. Après cette cure de rajeunissement, un culte spécial est célébré le 8 novembre de la même année, en consécration de sa rénovation, le tout sous la présidence du pasteur J. Bost.
Suivent, en 1914, des réparations nécessaires aux chaires des temples d'Arvert et d’Avallon. Le vieil harmonium d'Avallon est aussi visité par un accordeur.
En 2000, la municipalité a réhabilité le sol avec un carrelage de qualité.
Ici s’arrêtent nos archives et renseignements sur le temple d'Arvert.
Il faut noter, quand même, que, depuis sa construction, le temple d'Arvert a toujours été en activité.
Bibliographie :
Voir : le temple au XVIème, le temple au XVIIème siècle et le temple actuel.
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Texte : Robert Martel, tous droits réservés.